Le droit du travail en Turquie encadre les relations entre employeurs et salariés et fixe les obligations légales dans le cadre de l’emploi. Que vous soyez une entreprise étrangère implantée en Turquie, un expatrié ou un salarié local, comprendre le cadre juridique du droit du travail turc est essentiel pour éviter les litiges et garantir la conformité des pratiques RH.
En 2025, la législation turque continue d’évoluer pour s’aligner sur les normes internationales tout en répondant aux réalités du marché du travail local. Cet article vous propose un guide complet sur le droit du travail en Turquie.
1. Les sources du droit du travail en Turquie
La législation du travail turque repose principalement sur :
- La Loi n°4857 sur le travail (İş Kanunu), en vigueur depuis 2003.
- La Loi sur la sécurité sociale et l’assurance maladie générale (n°5510).
- Les conventions collectives.
- Les décisions des tribunaux du travail.
- Les normes internationales ratifiées par la Turquie (ex. : conventions de l’OIT).
Le ministère turc du Travail et de la Sécurité sociale (Çalışma ve Sosyal Güvenlik Bakanlığı) est l’autorité de régulation en la matière.
2. Types de contrats de travail
Le contrat de travail peut être :
- À durée indéterminée (CDI) : forme standard du contrat.
- À durée déterminée (CDD) : limité à un ou plusieurs événements spécifiques, renouvelable sous conditions.
- À temps plein ou partiel.
- À distance (télétravail) ou sur site.
- À période d’essai : pouvant aller jusqu’à 2 mois.
Le contrat doit être rédigé par écrit si la durée dépasse un mois. Il doit mentionner le poste, le salaire, les horaires, les conditions de rupture et les obligations des deux parties.
3. Temps de travail et heures supplémentaires
a. Durée légale du travail
En Turquie, la durée maximale légale du travail est de 45 heures par semaine, réparties sur 6 jours maximum.
b. Heures supplémentaires
Les heures effectuées au-delà de cette limite sont considérées comme heures supplémentaires (mesai). Elles doivent être rémunérées à 150 % du taux horaire normal, sauf si le salarié bénéficie de jours de repos compensatoire.
Le nombre d’heures supplémentaires ne peut dépasser 270 heures par an sauf disposition spéciale.
4. Salaires et rémunération minimale
Le salaire minimum national est fixé par la commission tripartite (employeurs, syndicats, État) et révisé deux fois par an.
Le salaire doit être versé en monnaie locale et payé au plus tard le 5 du mois suivant.
5. Congés et jours fériés
a. Congés annuels
Les salariés ont droit à un congé payé annuel en fonction de leur ancienneté :
- 14 jours pour moins de 5 ans d’ancienneté.
- 20 jours pour 5 à 15 ans.
- 26 jours au-delà de 15 ans.
Ces durées sont des minimums légaux, les conventions collectives peuvent prévoir davantage.
b. Jours fériés
La Turquie compte 12 jours fériés officiels, incluant :
- Le Jour de la République (29 octobre)
- La Fête nationale (23 avril)
- Le Ramazan Bayramı (fête de fin du Ramadan)
- Le Kurban Bayramı (fête du sacrifice)
6. Rupture du contrat de travail
Le droit turc distingue plusieurs modalités de rupture :
a. Démission
Le salarié peut quitter son emploi en respectant le préavis légal (2 à 8 semaines selon l’ancienneté).
b. Licenciement par l’employeur
Le licenciement doit être justifié : faute grave, absence non autorisée, baisse d’activité, inaptitude, etc. Dans le cas contraire, il peut être considéré comme abusif.
Le salarié a droit à une indemnité de licenciement s’il a travaillé au moins 1 an dans l’entreprise. Cette indemnité équivaut à un mois de salaire brut par année d’ancienneté.
c. Rupture immédiate
Certaines fautes graves (violence, vol, abandon de poste) permettent une rupture immédiate sans préavis ni indemnité.
7. Protection contre le licenciement abusif
La loi turque protège les salariés contre le licenciement injustifié, notamment si l’entreprise compte 30 salariés ou plus et que le salarié justifie de 6 mois d’ancienneté.
Le salarié peut alors :
- Contester le licenciement devant un tribunal du travail (İş Mahkemesi),
- Demander sa réintégration ou une indemnisation.
Le recours au médiateur du travail (arabulucu) est obligatoire avant d’aller en justice.
8. Sécurité sociale et obligations de l’employeur
Les employeurs doivent obligatoirement enregistrer leurs salariés auprès de la SGK (Sosyal Güvenlik Kurumu), l’institution de sécurité sociale turque.
Cotisations sociales :
- Cotisation patronale : environ 22,5 % du salaire brut.
- Cotisation salariale : environ 14 %.
Les cotisations couvrent :
- Accidents du travail.
- Retraite,
- Assurance maladie,
- Assurance chômage,
- Accidents du travail.
9. Droit syndical et représentation des salariés
Les salariés ont le droit de :
- Se syndiquer librement,
- Élire des représentants du personnel dans les grandes entreprises,
- Participer à des grèves dans le cadre légal.
Les syndicats sont régis par la Loi sur les syndicats et conventions collectives. Toutefois, dans la pratique, l’environnement syndical en Turquie reste complexe, notamment dans le secteur privé.
10. Spécificités pour les étrangers travaillant en Turquie
Les étrangers doivent obtenir :
- Une autorisation de travail (çalışma izni),
- Un permis de séjour valable,
- Un contrat conforme aux normes turques.
Les expatriés sont soumis aux mêmes obligations sociales et fiscales que les travailleurs turcs, sauf dispositions prévues par les conventions bilatérales.
11. Les juridictions du travail
Les litiges liés à l’emploi sont traités par les tribunaux du travail (İş Mahkemesi). Avant toute procédure judiciaire, un processus de médiation obligatoire a été instauré depuis 2018.
Le salarié ou l’employeur dispose d’un délai de 30 jours après la rupture du contrat pour saisir un médiateur.
12. Évolutions récentes du droit du travail turc
En 2025, plusieurs tendances marquent l’évolution du droit du travail en Turquie :
- Digitalisation accrue : bulletins de salaire électroniques, portails SGK en ligne, e-sécurité sociale.
- Meilleure protection du télétravail avec des règles spécifiques sur les horaires, la sécurité des données et les frais à charge de l’employeur.
- Renforcement des sanctions pour non-déclaration des salariés.
- Simplification des démarches de médiation et conciliation.
Le droit du travail en Turquie est un cadre juridique structuré, qui protège à la fois les droits des salariés et les intérêts des employeurs. Que vous soyez une entreprise en pleine expansion ou un salarié souhaitant faire valoir ses droits, il est essentiel de comprendre les règles en vigueur et de s’entourer de conseillers compétents.
Pour une gestion efficace des ressources humaines en Turquie, une bonne maîtrise du droit du travail est un levier stratégique. N’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en droit du travail ou un expert-comptable pour adapter vos contrats, vos pratiques et vos politiques internes aux exigences de la loi turque.
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